La régulation de la motivation

Dans les paragraphes précédents, nous avons commencé à évoquer la dopamine ou les endocannabinoïdes, qui font partie du circuit de récompense du cerveau. Pour préciser un peu tout cela, nous allons nous pencher brièvement sur ce qui sous-tend la régulation de la motivation au niveau du cerveau.

 

De façon très simplifiée, la motivation est un processus cérébral qui est lié à l’action de plusieurs neuromodulateurs, des substances produites par des neurones pour moduler, ou réguler, l’activité d’autres neurones. La motivation est fortement liée au fonctionnement de ce qu’on appelle le circuit de récompense dans le cerveau. Ce circuit fait intervenir principalement la dopamine, la sérotonine et les endocannabinoïdes (15).

 

La dopamine et la sérotonine interviennent dans les circuits de la motivation et de la récompense et interagissent entre elles. Chacune est produite dans une petite partie du cerveau, par des neurones qui se projettent vers tout le cerveau, agissant sur de nombreux processus cognitifs (mémorisation, apprentissage, motivation) mais aussi physiologiques (cycle veille-sommeil, reproduction, régulation cardio-vasculaire…). La sérotonine est aussi largement produite dans les intestins, à partir du tryptophane, en relation avec la composition de la flore intestinale (16). Les endocannabinoïdes ou EC (anandamide et 2-AG), produits localement, modulent l’action de la dopamine et de la sérotonine par des mécanismes directs et indirects.

 

La dopamine intervient dans l’initiation d’un mouvement nécessitant un effort, et sa continuité (15). Cela correspond à la définition de la motivation. Elle intervient dans l’anticipation du résultat, et l’évaluation de la différence entre récompenses attendue et reçue. En effet, sa production sera augmentée en association avec une récompense plus intéressante qu’attendu, ce qui renforcera le comportement qui y est associé, et diminuée dans le cas contraire (15). Ainsi, elle facilite l’apprentissage de ce qui permet de maximiser les résultats positifs (meilleure récompense). Elle est aussi liée à la formation de la mémoire associative, notamment liée à la peur (amygdale), ou mémoire spatiale (hippocampe) (17). Elle a une action régulatrice sur ces processus cognitifs, aussi n’en faut-il ni trop, ni trop peu.

 

La sérotonine intervient elle aussi dans le système de récompense. Notamment, elle soutient le renforcement en activant la libération de dopamine (15), et elle active l’inhibition du comportement en réponse à des stimuli aversifs, en inhibant la libération de dopamine (15,16) ou pour attendre une récompense retardée (15). Elle a donc un rôle clé dans l’équilibre entre récompense et aversion (16). Elle régule aussi les processus d’apprentissage et de mémorisation (17).

De plus, elle est liée au tempérament et à l’humeur. Un haut niveau de sérotonine dans le sang diminue l’agressivité et le comportement de dominance, envers les congénères ou envers l’humain, rendant ainsi le cheval plus coopératif dans ses échanges avec nous. (12).

 

Il y a de nombreuses interactions entre ces deux neuromodulateurs, qui sont encore peu comprises.

 

Les endocannabinoïdes, nommés ainsi en raison de leur ressemblance avec le cannabis, régulent les actions de la dopamine et de la sérotonine, affectant l’apprentissage et la mémoire (15, 17). Les EC agissent en particulier sur le système de récompense, en régulant le niveau de dopamine libéré en association avec une récompense, et sont associés au phénomène d’addiction (17).

Fait intéressant, la production d’EC est augmentée par l’exercice physique, améliorant les fonctions cognitives d’apprentissage et de mémorisation, notamment pour l’apprentissage de séquences motrices, en augmentant la plasticité neuronale dans l’hippocampe (18). Ainsi, par exemple, un galop en fin d’échauffement facilitera l’apprentissage et la mémorisation d’un nouveau mouvement qui sera travaillé juste après.

 

Comme tu peux le voir, tout cela est assez compliqué, ces molécules agissent les unes sur les autres, ce qui permet une régulation fine de tous les processus cognitifs. Heureusement, tu n’as pas besoin de tout retenir pour échanger avec ton cheval ! Mais ces informations te permettent de mieux comprendre certains aspects de la motivation, l’apprentissage et la mémorisation de ton cheval. Comme par exemple le fait que le sucre est addictif car il agit sur les neurones dopaminergiques, ou que l’exercice physique favorise la mémorisation. Tu peux aussi faire la corrélation avec la maladie de Cushing, fréquente chez les vieux chevaux, liée à une diminution de la production de dopamine dans le cerveau. Ou encore comprendre comment un déséquilibre de son microbiote intestinal peut avoir des répercussions sur l’humeur et la motivation de ton cheval, en l’amenant à produire moins de sérotonine.

Une autre monoamine intéressante à connaître est la noradrénaline, qui joue un rôle dans l’attention, la régulation des émotions, et la réponse au stress. Elle a un rôle régulateur dans la consolidation de la mémoire. Elle améliore l’apprentissage et la mémoire dans l’hippocampe, en améliorant la plasticité neuronale. Les EC ont ici aussi un effet régulateur (17).

Enfin, d’autres neuromodulateurs influent sur la motivation du cheval à échanger avec nous, mais de façon moins directe. C’est notamment de cas de l’ocytocine.

Il s’agit d’une molécule aux effets très divers, qui agit sur l’appétit, le rythme cardiaque, la douleur, mais qui est aussi bien connue pour son action sur le déclenchement de la mise-bas et de l’allaitement, ainsi que la création du lien mère-petit, ou du lien social en général. Son action sur l’amélioration des relations interpersonnelles serait principalement une conséquence de contacts tactiles (19).

De même que la sérotonine, elle va influencer la réceptivité du cheval dans ses échanges avec l’humain, ou plus précisément sa motivation à échanger avec nous, en le rendant plus sociable (12, 13,14). Elle le rendrait aussi plus confiant, moins peureux (12).

Les gratouilles que nous faisons à notre cheval, dans le cadre de notre relation d’amitié, augmentent sa production d’ocytocine, et nous comprenons ainsi tout leur intérêt.

Et la boucle est bouclée, nous revenons à l’amitié avec notre cheval…

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