Renforcement et motivation, 2 choses à bien différencier
Renforcement et motivation sont 2 choses couramment confondues ou assimilées l’une à l’autre, et pourtant il est important de bien les différencier. En effet, cette nuance peut te permettre de mieux comprendre ton cheval.
Motivation extrinsèque ou intrinsèque, définition
La motivation est ce qui pousse le cheval à faire quelque chose. Ce qui lui donne envie de le faire. Elle peut être extrinsèque ou intrinsèque. Une motivation extrinsèque pousse le cheval à effectuer une action pour obtenir quelque chose. Par exemple, éviter la douleur ou obtenir une récompense alimentaire. Une motivation est dite intrinsèque si c’est l’action effectuée elle-même qui motive le cheval. Parce qu’il y prend du plaisir.
La motivation intervient donc avant l’apparition d’un comportement.
Renforcement positif ou négatif, définition
Renforcer un comportement, c’est y réagir de façon à encourager le cheval à le réitérer. On va donc y avoir recours quand on veut, par exemple, valider une réponse du cheval à une demande qu’on lui a faite. Si on opte pour le renforcement négatif, lorsque le cheval donne la bonne réponse on retire un stimulus. Par exemple, on tapote doucement le flanc du cheval du bout des doigts, et dès qu’il décale les hanches on arrête. Si on opte pour le renforcement positif, dès que le cheval exprime un comportement qui nous plait, on ajoute un stimulus. Par exemple, on lui donne une récompense.
J’attire donc bien ton attention sur les mots « positif » et « négatif » qui ont dans ces expressions un sens quantitatif et non qualitatif. Ils signifient « j’ajoute un stimulus » ou « je retire un stimulus ». En aucun cas « j’utilise une méthode bienveillante pour le cheval et je suis une bonne personne » et « j’utilise une méthode violente pour le cheval et je suis un être mauvais ». D’ailleurs, je t’invite à lire mon article sur le renforcement positif si cela t’intéresse de creuser cet aspect de la question.
Le renforcement intervient donc après l’apparition d’un comportement.
Pour pouvoir renforcer un comportement de ton cheval, tu dois d’abord l’avoir motivé à le produire
Le renforcement ne le devient qu’après coup…
Le renforcement intervient après un comportement que tu veux renforcer chez ton cheval. Pour pouvoir renforcer, il faut donc que ton cheval ait proposé ce comportement. C’est là tout le problème des personnes qui souhaitent n’utiliser que le renforcement positif, qu’elles assimilent le plus souvent à l’utilisation de récompenses alimentaires. Comment faire une demande au cheval sans utiliser de renforcement négatif ?
C’est là qu’elles font une erreur. Car elles assimilent également l’indication donnée au cheval pour le motiver à produire un geste à du renforcement négatif. Renforcement qu’elles jugent « négatif » au sens qualitatif et donc « mauvais », « méchant » ou « violent » pour le cheval. Alors que le mot négatif est simplement quantitatif. Il signifie « qui retire », un stimulus en l’occurrence. Or, comme nous venons de le dire, on ne peut renforcer qu’un comportement qui c’est déjà produit. Qu’est-ce que cela signifie ?
Cela signifie que lorsque tu tapotes le flanc de ton cheval du bout des doigts, tu cherches à créer chez lui une motivation à bouger. Ce n’est qu’une fois que le cheval bouge et que tu cesses ce tapotement que l’action complète devient une forme de renforcement négatif. Mais imaginons que le cheval ne bouge pas et que tu cesses pour chercher une autre façon de le motiver. Alors tu n’auras rien renforcé du tout. Tu auras juste habitué ton cheval à se faire tapoter le flanc du bout des doigts. Ce qui signifie que ton geste ne devient renforcement négatif ou positif qu‘‘à la fin de la séquence d’échange avec le cheval. Il ne l’est pas par nature. Et donc le débat sur l’utilisation du renforcement négatif est un non sens.
Ce qui importe vraiment, c’est de savoir si tu utilises la peur et la douleur pour motiver ton cheval ou renforcer certains de ses comportements. Car ça c’est à proscrire, bien évidemment.
La motivation doit être là au départ
Si tu veux pouvoir renforcer des comportements de ton cheval, il faut d’abord qu’il s’intéresse à toi. Qu’il rentre en communication. Tu dois donc le motiver à échanger avec toi. Et pour cela tu dois déterminer quelles sont ses potentielles motivations.
La motivation du cheval peut être intrinsèque
La 1ère motivation qui peut amener un cheval à échanger avec toi peut être par exemple sa curiosité. Elle va l’amener à t’observer, ce qui est suffisant pour commencer à créer un langage. Puis, s’il ose t’approcher, elle va le pousser à te sentir, à poser le nez et les lèvres sur toi et les objets que tu pourrais tenir ou lui présenter. Encore une possibilité d’apprentissage.
Puis d’autres formes de motivation interviendront, si tu parviens à les faire naître. Celle de se sentir compris, écouté, et en capacité de communiquer. Parce que cela remplit son besoin de se sentir en lien et en sécurité. 2 choses qui sont liées chez un animal de troupeau. Celle de se sentir bien, si tu sais lui rendre ta présence et la communication avec toi confortables. La motivation à jouer, peut-être. À relever des défis et trouver des solutions aux problèmes que tu lui poseras. La motivation à bouger aussi. Pour se sentir bien dans son corps, assez fort et puissant pour fuir si besoin était. Etc.
Ces formes de motivation sont intrinsèques. Le cheval est motivé à venir vers toi, à communiquer avec toi et à rester à tes côtés parce que cela lui fait du bien. Tu n’as besoin d’aucun facteur extérieur pour le motiver à te suivre et à échanger avec toi.
Ou bien tu peux faire naître chez le cheval une motivation extrinsèque
Si tu ne parviens pas à faire naître ce type de motivation chez ton cheval, tu peux être tentée de chercher à le motiver par des facteurs extérieurs. Tu peux notamment choisir entre la peur de la douleur et sa motivation pour le sucre et les denrées rares.
Dans le 1er cas, pour que ton cheval reste près de toi en liberté par exemple, tu vas le chasser vigoureusement et lui rendre très inconfortables les moments où il s’éloignera de toi. Et pour qu’il fasse un piaffer par exemple, tu frapperas fortement ses tendons fléchisseurs postérieurs tout en le retenant fermement devant, si besoin avec un mors bien sévère.
Dans le 2nd cas, tu auras sur toi des friandises qu’il sentira et qu’il aura tellement envie d’avoir qu’il te suivra partout et cherchera à comprendre tout ce que tu lui demanderas.
Dans les 2 cas, à chaque comportement produit qui te plaira, tu pourras utiliser à la fois le renforcement négatif et le renforcement positif. Souviens-toi, tapoter du bout des doigts et relâcher quand le cheval bouge c’est du renforcement négatif !
Un comportement pour lequel le cheval éprouve une motivation intrinsèque n’a pas besoin d’être renforcé
L’une des limites du conditionnement opérant, c’est l’extinction des comportements renforcés. C’est à dire qu’au bout d’un moment, peu importe comment un comportement est renforcé, le cheval peut cesser de le proposer. Tout simplement parce que cette méthode ne prend pas en compte la motivation ! Or, c’est sa motivation qui fait bouger le cheval. C’est donc ça qui nous intéresse.
Et si on veut que cette motivation dure dans le temps, elle doit être intrinsèque. C’est à dire que si tu veux que ton cheval continue de faire quelque chose qui te plait, tu dois trouver un moyen pour que ça lui plaise à lui aussi. Parce qu’alors le simple fait de le faire est une forme de renforcement positif. Tout simplement.
Exemple des récompenses alimentaires
Suite à une publication sur un réseau social, l’une d’entre vous m’a fourni un très bon exemple pour imager tout ça ! J’en profite pour vous remercier pour tous vos commentaires qui m’inspirent énormément pour écrire de nouveaux articles. Pour vous préciser le contexte, elle venait de dire que même pour une friandise quand le cheval ne veut pas il ne veut pas. Et j’avais cru qu’elle parlait de surmonter des difficultés, lorsque le cheval était effrayé ou en souffrance. Mais non.
Chloé utilise la friandise comme renforcement positif
Dans ce commentaire, Chloé nous explique que son cheval reçoit une récompense chaque fois qu’il touche une cible en mousse. Elle utilise donc une friandise comme renforcement positif, pour inciter son cheval à continuer de toucher la cible. Peu importe son appétence, la friandise reste une forme de renforcement pour ce comportement. Seulement, on ne peut renforcer qu’un comportement qui est exprimé. Il faut donc en 1er lieu que le cheval soit motivé à produire ce comportement. Pour cela, elle a pu utiliser sa curiosité. Elle lui a présenté l’objet et lorsque, curieux, il l’a touché du bout du nez, elle lui a donné une friandise. Ou alors, elle a touché son nez avec sa cible et lui a donné une friandise. Espérant que cette friandise le motive à chercher à comprendre comment en obtenir davantage et qu’il fasse le lien avec l’objet qui venait de lui toucher le nez.
Mais elle utilise aussi la friandise comme source de motivation extrinsèque
Si la friandise est rare et qu’il en obtient peu, elle devient une motivation extrinsèque de taille ! Dès qu’il la sent, il est prêt à tout pour l’obtenir. Et donc motivé à essayer de comprendre quel comportement le lui permettra. Ou à répéter celui qu’elle aura été utilisée pour renforcer. On pourra se souvenir de l’étude qui avait montré chez le rat l’apparition d’une motivation plus forte pour le sucre que pour une substance aussi addictive que la cocaïne. Par contre, si le cheval en obtient facilement et en quantité, elle perd sa rareté et tout son intérêt. Il y a disparition de la motivation extrinsèque. C’est ce qui se passe rapidement avec le cheval de Chloé.
Et lorsque le cheval n’est plus motivé par la friandise, elle s’aperçoit qu’il n’avait aucune motivation intrinsèque à produire cette action
Puisque l’action en elle-même n’a aucun intérêt pour le cheval, il cesse de la produire. C’est à dire qu’il n’avait aucune motivation intrinsèque à la réaliser. C’est l’extinction du comportement dont je parlais plus haut. L’extinction survient donc lorsque le cheval perd sa motivation pour le stimulus qui était utilisé comme renforcement positif à un comportement pour lequel il n’a aucune motivation intrinsèque.
Donc par exemple, si tu travailles avec ton cheval une fois par mois et que tu utilises des récompenses alimentaires, elles seront probablement une grosse source de motivation. Si tu les utilises au quotidien avec un cheval extrêmement motivé par la nourriture, elles le seront aussi. Mais si tu les utilises régulièrement avec un cheval peu motivé par la nourriture, elles ne seront pas une source de motivation. Tout au plus pourront-elles renforcer un comportement le temps de son apprentissage.
Exemple des caresses ou grattouilles
En commentaire à la même publication, voici une question qui m’a été posée : « Et si on utilise le grat grat comme récompense ? C’est exactement un renforcement positif. Quel est votre avis ? »
Là, la personne a fait une confusion. Car mon texte portait sur la nature de la motivation et non du type de renforcement utilisé. J’ai donc répondu pour les 2 et je vous le détaille un peu plus ici.
Le contact, les caresses et les grattouilles peuvent être une motivation pour le cheval à être en lien avec nous. Si tant est qu’il apprécie le contact qu’on lui propose. Cependant, dès lors que cela fait partie de nos rituels, nous ne pouvons plus l’utiliser pour motiver le cheval à produire un effort important. Puisqu’il en reçoit à profusion, pourquoi fournirait il un effort pour ? C’est le même principe que si on voulait utiliser le foin ou l’herbe dont il dispose à volonté pour le motiver ou renforcer un comportement.
À moins bien sûr que ton cheval souffre d’une dermite. Auquel cas clairement, se faire gratter là où ça le démange horriblement devient une motivation extrinsèque de taille ! Mais dans ce cas l’utiliser comme récompense serait questionnable…
Donc le cheval peut être motivé par des grattouilles. Mais cette motivation ne sera pas forcément suffisante en elle-même pour des actions qui lui demanderaient trop d’efforts. Pour cela, il faudra que le geste ou le mouvement demandé lui procure une récompense en lui-même. Il deviendra alors une motivation intrinsèque.
Par contre, elles peuvent renforcer un comportement. Pas forcément de façon primaire, mais en tous cas de façon secondaire. Sous réserve bien sûr qu’il ait été motivé à proposer ce comportement de prime abord.
En résumé, le plus important n’est pas le type de renforcement que tu utilises, mais le type de motivation que tu fais naître chez ton cheval
Si tu m’as bien suivie jusqu’ici, tu as compris que le plus important c’est que ton cheval ait envie de participer. Et la raison pour laquelle il en a envie. S’il le fait parce que ça lui fait plaisir, ça devient facile pour toujours. Il devient un partenaire volontaire qui adore échanger avec toi. Il est ouvert à tout ce que tu proposes, il apprend vite, et votre quotidien est facile et harmonieux.
C’est pour cela que le chemin que je choisis avec les chevaux et que je peux t’enseigner est celui qui passe par la motivation intrinsèque du cheval.
Cette approche t’intéresse et tu veux apprendre à motiver ton cheval à échanger avec toi en lui rendant chacun de ces échanges plaisant ? Alors rejoins ma dernière formation : « Objectif Motivation » !
merci laure pour cette clarification qui vient à point nommé pour m aider à construire une relation de confiance avec mon cheval Nadal
y a plus qu à faire grandir la motivation intrinsèque qui commence à poindre chez lui.
merci
Merci pour ce retour ! J’en suis très heureuse si ça peut vous aider sur votre chemin ! 🙂