defemmeacheval@gmail.com       

Journal de Kiano - Séances commentées en direct en vidéo - Travail à pied et monté, dressage sans mors, liberté - Formation Équestre Laure Souquet

Faire monter le dos du cheval, une question d’impulsion

À une heure où tant de chevaux travaillent en sous impulsion, retenus par des mains fermes qui veulent les rassembler, je ne peux m’empêcher de te parler d’impulsion. En effet, faire monter le dos du cheval, c’est une question d’impulsion. Je t’explique tout de suite pourquoi l’impulsion est la clé d’une belle équitation.

Un cheval qui monte son dos, qu’est-ce que ça veut dire ?

Dès lors qu’on s’intéresse un tant soit peu au dressage, on entend dire que le cheval doit monter son dos. Ceci pour qu’il puisse porter son cavalier sans en souffrir, comme je vous l’explique dans un article sur le dos du cheval. En résumé, le dos du cheval est tel un pont suspendu entre ses membres antérieurs et postérieurs. Lorsqu’un poids s’y pose, il a deux solutions pour y répondre. Soit il creuse son dos et risque de se faire mal. Soit il fléchit sa colonne et peut alors supporter le cavalier sans en souffrir. Pour bien monter un cheval, il faut donc l’amener à monter son dos.

La théorie de l’extension d’encolure pour faire monter le dos du cheval

Pour cela, on tente généralement d’agir sur la position de l’encolure et l’engagement des postérieurs. Effectivement, une idée répandue veut que pour fléchir son dos le cheval doive engager ses hanches sous la masse tout en baissant son encolure vers le sol. On voit donc des cavaliers demander l’extension d’encolure tout en stimulant les postérieursLe cheval tombe alors généralement sur les épaules et ses postérieurs restent traîner derrière.

Son poids est amené en avant par l’abaissement de son encolure. Certes, cette position tend son ligament nuchal et sus-épineux et amène ses vertèbres en flexion. Toutefois, la plupart des chevaux n’ont alors plus la souplesse nécessaire pour engager leurs postérieurs. Tente une expérience pour le comprendre. Mets-toi debout et penche toi en avant jusqu’à ce que tes mains touchent le sol (ou presque). Dans cette position, mets-toi à marcher en faisant les plus grands pas possible. C’est ce que ressent un cheval en extension d’encolure. Donc son dos est fléchi mais tout son poids est porté par une avant-main qui fatigue. Et la fameuse remontée de l’encolure vers le rassembler à la faveur d’un engagement toujours plus fort des postérieurs ne vient jamais chez la majorité des chevaux. À mon sens, ce n’est donc pas la bonne réponse.

La théorie de la mise en main par la décontraction de la nuque du cheval

Une autre façon de travailler pour faire monter le dos du cheval consiste à chercher à faire céder sa nuque. La théorie veut qu’en jouant avec la bouche du cheval on puisse l’amener à décontracter sa mâchoire et sa nuque jusqu’à ce que son chanfrein se trouve à la verticale. Cela serait censé amener toute sa colonne en flexion. Bien sûr, ce n’est pas le cas car un cheval peut tout à fait fléchir sa nuque tout en maintenant son dos en extension. On voit donc beaucoup de cavaliers bouger les doigts sur leurs mors ou même apprendre la cession à leur cheval jusqu’à ce qu’il sache maintenir son encolure dans cette « belle » position toute une séance. Malheureusement, le cheval a alors les muscles de l’encolure contractés, de même que ceux du dos, et ses postérieurs traînent toujours derrière. En outre, on ne peut décontracter qu’une nuque contractée. Et par quoi le serait-elle sinon par ta main contre laquelle elle résiste ? 

Laisse donc la bouche du cheval tranquille, elle ne fera jamais monter son dos !

La théorie du rassembler par le ralentissement de l’allure 

Une autre idée est que le rassembler serait obtenu par une diminution de l’impulsion. Cela vient du fait qu’un cheval qui se rassemble pour des airs de haute école avance moins vite qu’en temps normal. Car il reporte du poids sur l’arrière-main, rassemblé sur ses postérieurs. Naturellement, son encolure se raccourcit, se verticalise, sa nuque fléchit et son chanfrein arrive à cette fameuse position verticale. Seulement, ce résultat n’est pas dû à un ralentissement de l’allure, à une diminution de l’impulsion. C’est plutôt le contraire : le cheval se rassemble pour libérer ses épaules et son dos. Du coup, son allure ralentit car son impulsion qui le projetait en avant le projette à présent vers le haut. C’est ça, le véritable rassembler. Un résultat du développement de l’impulsion, de la force, du gainage et de la souplesse du cheval.

Aussi est-il tout à fait vain de chercher à obtenir le rassembler en ralentissant son cheval. Un cheval qu’on retient meurt dans son allure. Il s’alourdit, s’endort, et n’ayant plus d’impulsion il n’a plus d’allant ni de brillant. Un tel cheval peut apprendre à lever les jambes sur demande ou à les croiser en tombant en déséquilibre. Mais la sous impulsion empêche l’équilibre qui doit être dynamique et soutenu par le jeu de muscles toniques. Un cheval qui se traîne ne peut en aucun cas muscler ses abdominaux ni son dos. Pour cela, il a besoin de mouvement. Il est donc impossible d’amener un cheval à monter son dos s’il manque d’impulsion !

Faire monter le dos du cheval, c’est faire monter son thorax entre ses épaules

Comme je te l’expliquais au début de cet article, le dos du cheval est comme un pont suspendu entre ses membres. Toutefois, on ne peut comprendre comment le faire monter et fléchir si on ne s’intéresse pas aux attaches entre dos et membres. Derrière, le dos s’attache aux postérieurs via les articulations sacro-iliaques. Elles relient le sacrum au bassin, lui-même articulé aux fémurs via les articulations des hanches. Ses articulations sont solidement maintenues par de puissants ligaments et capsules articulaires. Par contre, devant, le cheval n’ayant pas de clavicules, aucune articulation ne relie dos et membres antérieurs. Le dos du cheval est simplement suspendu entre ses épaules par un ensemble de muscles qui forment la ceinture scapulaire.

Cette liaison musculaire permet au cheval de réceptionner son poids ainsi que l’impulsion venant des postérieurs avec une grande souplesse. Pensez aux chevaux qui sautent de grandes hauteurs. On voit clairement leur dos descendre entre leurs épaules à la réception puis remonter dès que les postérieurs se ramassent de nouveau sous leur ventre pour repartir.

Faire monter le dos du cheval, c’est donc faire travailler sa ceinture scapulaire de façon à ce que sa colonne vertébrale remonte entre ses épaules. Pour cela, il faut une impulsion qui vienne des postérieurs et se transmette à l’avant-main via un dos souple, tonique et exempt de tensions. Alors, les cervicales basses sont tirées vers le haut et en flexion, et donc l’encolure descend. Le garrot monte et sous la selle tu as l’impression que ton cheval prend soudain quelques centimètres. La montée du dos, c’est ça. Elle s’obtient sans toucher aux rênes. Une fois que tu l’as ressentie, tu ne peux plus jamais oublier cette sensation. Tu auras senti comment l’impulsion juste fait monter le dos du cheval entre ses épaules. 

Concrètement, comment gérer l’impulsion pour faire monter le dos du cheval ?

Avant de te préoccuper de son impulsion, veille à ce que le cheval soit calme

Pour que le corps du cheval fonctionne librement, il doit avant tout être calme. En effet le stress crée une tension musculaire qui enlève aux muscles toute souplesse. De plus, il entraîne la contraction réflexe de la ligne du dessus du cheval. Tête en l’air et dos creux, le cheval est incapable de se concentrer tout autant que de fléchir don dos. Avant tout, veille donc à ce que ton cheval soit et reste détendu pendant toute la séance de travail. Pour cela, offre-lui des conditions de travail correctes en étant toi-même calme et en choisissant un espace dans lequel il se sente en sécurité. Fais preuve de douceur et de patience et respecte son rythme.

Puis, mets ton cheval en avant

Ton cheval étant calme et détendu, laisse sa bouche ou sa tête tranquille et demande-lui d’avancer d’un bon pasTu dois sentir son dos monter énergiquement sous tes fesses à chaque poussée d’un postérieur. Lorsque tu as cette sensation, il convient de la garder. Ton cheval ne devra plus marcher moins vite que cela.  Note que c’est aussi valable à pied, bien sûr. Pour bien capter la sensation, tu peux t’amuser à demander à ton cheval de ralentir jusqu’à ce qu’il ne tienne plus son dos. Demande alors à nouveau plus d’action et sents la montée du dos.

Fais toutefois attention ! Impulsion ne signifie pas précipitation. Ton cheval doit avancer d’un bon pas mais pas s’effondrer en avant. Il faut trouver la juste mesure. Celle qui convient à ton cheval en particulier.

Une fois l’impulsion obtenue, cherche l’équilibre grâce à une incurvation correcte

Une fois que ton cheval saura utiliser son impulsion pour faire monter son dos, il te restera à l’amener à te porter en équilibre. Pour cela, il te faudra apprendre à l’incurver comme il se doit, afin de pouvoir le diriger avec souplesse et précision. En engageant son postérieur intérieur loin sous la masse afin de soutenir l’engagement en avant et la tenue de son épaule extérieure. Aucun cheval n’a besoin qu’on lui apprenne à monter son dos ni à bien s’incurver. Regarde de jeunes chevaux jouer, ils savent très bien piaffer et s’éloigner en épaule en dedans d’un objet pour lequel ils oscillent entre crainte et curiosité. Tu dois juste trouver une position appropriée qui ne dérange pas le cheval. Et apprendre à lui demander l’incurvation en plaçant ta  jambe où il faut, ton poids légèrement à l’intérieur pour ne pas le déséquilibrer, et en utilisant ta propre épaule extérieure pour tenir la sienne. Note que pas une fois je n’ai parlé de ta main intérieure ni d’une rêne d’ouverture. Je t’expliquerai pourquoi dans un prochain article sur l’incurvation.

Ton cheval étant calme, avançant avec une bonne impulsion et sachant s’équilibrer dans les tourner, tu as atteint l’équilibre. Il ne reste plus, alors, qu’à le conserver lors des mouvements latéraux et dans les allures supérieurs du trot et du galop. 

Respecte ton rythme et celui de ton cheval

Au pas, le travail de l’impulsion et de l’équilibre est à la portée de tous. Mais au trot, l’idée est la même. Et lorsqu’on lance un cheval dans un trot soutenu, on perd souvent le contrôle de la direction. Pourquoi ? Cela pour trois raisons.

D’abord, parce qu’un cheval peu avancé dans son travail avance souvent en déséquilibre, surtout avec un cavalier sur le dos. Manquant d’équilibre, il peine lui-même à contrôler sa direction avec précision et notamment sur des courbes serrées. Ensuite, il est plus difficile pour le cavalier de suivre souplement le trot du cheval avec une bonne impulsion tout en gardant son haut du corps, son poids et ses jambes à leur place. Aussi dérange-t-on plus facilement son cheval quand il avance et manque-t-on plus facilement de précision dans le placement des aides. Enfin, plus l’allure est vive et plus le cavalier émotif risque de stresser. D’autant plus s’il lui semble qu’il perd le contrôle. Alors il se tend, bloque son dos, rebondit dans la selle, secoue les mains et avance ses jambes. Le cheval ne comprend plus rien et c’est le cercle vicieux. Je gage que c’est pour cette raison que nombre de cavaliers travaillent en sous impulsion, au risque d’abîmer le dos de leur cheval.

Pour éviter cela, avancez à votre rythme et à celui du cheval. Commencez par obtenir calme, impulsion et équilibre au pas. Développez votre assiette en longe ou en trotting à l’extérieur sur des chemins sûrs. Et ne commencez à travailler le trot que lorsque vous saurez amener votre cheval à l’équilibre au pas et suivre avec aisance son trot avec une bonne impulsion. Patience et longueur de temps…


Laure Souquet

Photographe : Kevin Simonet

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Retour en haut
Plateforme de Gestion des Consentements par Real Cookie Banner